Ohan Tuhdarian dit Jean Vendome (1930-2017), découvre très tôt une passion pour la joaillerie et le dessin. Il affirme rapidement sa volonté de créer des pièces fortes et emblématiques, loin des productions de la joaillerie classique – d’après lui, « les multiples sont la mort de la créativité dans la fabrication de bijoux ».
Faute de moyens, il se concentre sur des minéraux et gemmes qui ne sont pas considérés comme précieux ; déclarant que son « style s’est construit principalement sur le manque de moyens compensé par l’imagination ». Ses compositions abstraites peuvent aussi bien évoquer l’architecture new-yorkaise, les étoiles ou le monde végétal…
A travers cette démarche, il met en lumière des pierres sous diverses formes dont il tire parti de leur morphologie curieuse façonnée par la nature ou par une anomalie… On peut ainsi trouver dans ses créations toutes sortes de quartz : améthyste, citrine, cristal de roche ou bien encore des tourmalines, des opales…
Repensant entièrement la structure des bijoux, il se sert du vide pour créer une nouvelle esthétique. Cette sublimation du vide structure la composition et donne une légèreté nouvelle à l’objet. Il développe ainsi la bague « Tour » en 1956, où l’équilibre réside dans le déséquilibre. Bien que la bague semble vide et incomplète, il s’agit en réalité d’une pièce stable et très dynamique. Ce que l’on apprécie toujours dans ses créations est de voir ces pierres dressées vers le haut et ne prenant aucun appui. Dans la plupart de ses créations, le joaillier est en rupture avec la symétrie. Réelle nouveauté, cette dissymétrie parvient à donner aux pierres un relief qui magnifie la personne portant le bijou et transforme la monture en un véritable décor.
Si habituellement la bague Tour est composée d’un anneau à base carré, ce n’est pas le cas de celle-ci. Le joaillier, toujours ouvert aux suggestions et préférences de sa clientèle, n’hésite pas à adapter la bague à sa demande. Il s’accordait à dire qu’un bijou naît toujours de la rencontre d’une femme, d’une pierre et d’un joaillier.
Jean Vendome a su trouver un langage apte à séduire une clientèle choisissant la création avant le label. Considérant le bijou comme une œuvre d’art, il imagine finalement des sculptures miniatures qui se portent.
- LEFEVRE Sophie, Jean Vendome, Editions Somogy, 1999, p.51-53, p.84-85
- CREGUT-LEDUE Marlène, Jean Vendome, les voyages précieux d’un créateur, Editions Faton, 2008, p.39-43